Chapitre 13 : A la va comme je te pousse

Piéton depuis 5 mois, le reporter en herbe nous donne son point de vue sur les transports dans la capitale.
Sue-Ellen qui aimait Bobby en cachette, ne veut pas divorcer de J.R. à cause du pognon. Mais elle a fait la terrible erreur d'en faire la confidence à Milou -- son chien bâtard croisé du teckel allemand de sa sœur avec le berger belge de l'amant de Marguerite. J.R., pas si sot, se doutait de quelque chose et avait subtilisé le vrai Milou par une réplique Bionique portant un micro miniaturisé. Sue-Ellen, plus stupide, n'avait pas remarqué que son toutou ne demandait plus à sortir. Elle est justement en train de se faire la remarque quand Bobby sort du placard, Milou pète un fusible et J.R. pénètre en furie dans la chambre.

On m'avait bien dit que Pékin était une ville gigantesque, et que les infrastructures, comme du reste dans toute la Chine, rendaient les déplacements problématiques.
Pourtant, à l'aéroport international qui a un arrière goût de la piste démontable du Vol 747 pour Sydney, ça ne m'avait pas paru si compliqué. Une magnifique Audi noire avec Chauffeur m'attendait.

Le mythe du Chinois à Bicyclette n'est pas une légende. Les parcs à vélos abondent et comme tout rassemblement à l'échelle de ce pays, ce sont des milliers d'engins agglutinés qui, à l'occasion d'une manœuvre maladroite ou d'un coup de vent, s'étalent comme des dominos. Il faut dire que c'est le moyen de transport le plus adapté pour les chinois. Bien que la ville soit grande, beaucoup vivent sur leur lieu de travail et n'ont pas besoin de faire de grands déplacements. C'est un moyen autonome (comme le souligne le nom chinois) pratique que je n'ai cependant pas (encore) adopté.

Je ne me sens pas assez agile pour me frayer un chemin au milieu de ces conducteurs égocentriques klaxonnant toutes les 2 secondes. Autant les bicyclettes sont relativement disciplinées, autant les voitures sont imprévisibles. Les feux de signalisation (à ce sujet, on se souviendra que pendant les années Mao, il avait été suggéré d'intervertir le rouge et le vert : le rouge ne pouvant signifier l'immobilité) ne sont pas respectés. Les lignes au sol ne sont pas respectés (j'ai vu une rue à 4 voies complètement bloquée car les conducteurs tentaient de rouler sur les 2 voies de gauche). Les piétons ne sont pas respectés. Les cyclistes ne sont pas respectés. Aucun autre usager de la route n'est respecté. Pour peu que l'on appartienne à un échelon élevé de la hiérarchie militaire, on est en droit de mettre un gyrophare rouge sur son toit noir et de foncer, toute sirène hurlante (ponctuée de coup de klaxon), à travers les embouteillages. La route est un marasme incroyable mais pourtant je n'ai été témoin que de peu d'accidents, souvent des petits accrochages.

Les taxis sont un moyen bon marché (pour les étrangers) de traverser la ville. Ils sont assez abondants et les chauffeurs sont extrêmement loquaces. Pour les étudiants francais, les sujets sont souvent les mêmes dans le même ordre, ce qui permet de répondre même quand on ne comprend pas la question : tu es de quel pays? tu travailles ou tu étudies? Tu étudies où? Le Chinois c'est difficile à apprendre (plusieurs variantes)? Les francaises sont jolies / Coupe du monde 98. Tu as une copine / Tu es marié? On se marrie à quel âge en France?

Je ne parle pas des bus que je fréquente peu. Ces bus délabrés et bas de plafond, envahis aux heures de pointes sont un exemple de service public. Moins de 1 yuan le trajet sur la plupart des lignes (assez nombreuses). Je ne parle pas non plus du métro qui n'existe quasiment pas.

Je ne parle pas des cyclo-pousses qui existent bien mais réservés aux promenades touristiques.

La neige, tombée ces derniers jours, est source de nombreux problèmes. Il n'existe aucun engin de déneigement, et les routes, non salées, se transforment en patinoire. Les cyclistes sont souvent par terre et les piétons aussi. Toutes les voitures roulent au ralenti et très prudemment. Plus de klaxon qui vitupère, presque plus de queue de poisson. Un calme assourdi par la neige. On aimerait que ça dure plus longtemps. Mais le beau temps revient, des cohortes de balayeuses venues d'un autre âge balaient la neige et cassent la glace à coup de pelle. Le soleil achève le travail et les klaxons reprennent.